Fort
braillard
En cette période
caniculaire, les esprits s’échauffent. Précisément sur la longe de Boyard où
ça ne va pas très fort. La Boule (Yves Marchesseau à la ville), célèbre geôlier
de l’émission phare de France 2 a le moral à zéro. Selon ses propos tenus récemment
dans les colonnes du quotidien Sud-Ouest, il déplore les conditions de tournage
assimilées à du travail d’usine. Les enregistrements s'enchaînent tandis que
les critiques se déchaînent. Probablement fatigué entre deux coups de gong
tonitruants, il persiste et signe en catapultant un boulet de canon en plein
visage de Jean-Pierre Castaldi qui anima le jeu estival entre 2000 et 2002 lui
reprochant notamment d’avoir fait couler l’audience. Grande gueule en dehors
comme en dedans, Castaldi castagne à son tour. A son époque déjà révolue, il défend
une audience bien plus élevée que les chiffres actuels (environ 29% de parts de
marché contre 17,5% aujourd’hui) et se demande si son accusateur ne serait pas
en train de perdre la boule. Après vingt ans de routine, nous pouvons aisément
comprendre la lassitude de ce gardien prisonnier - à son tour - de ce rôle
ingrat. Sans parler de son
physique atypique beaucoup plus effrayant que les bébêtes poilues, grimpantes
ou visqueuses des épreuves effroyables, il craint à son tour de passer à la
trappe comme son copain Passe-Temps remercié en 2010. Ceci dit, la Boule ne
bulle pas hors antenne. Accompagné de son acolyte Passe-Muraille, il fait la
promotion des produits régionaux dans les supermarchés. Gras comme un cochon,
je l’imagine vanter la saveur poivrée d’un saucisson d’âne ou le savoir-faire d’une
terrine forestière aux cèpes. Croisons les doigts pour le maton le plus
sympathique de la télévision et souhaitons lui des lendemains moins ronchons. Que
sa rancune cathodique plonge à jamais dans les profondeurs de l’océan où gisent
quelques indices irrécupérables. Au fil du temps, l’émission a perdu de sa
superbe. Les épreuves deviennent très (ou trop) difficiles voire inadéquates au
concept dit historique. Qui a eu l’idée saugrenue de la cellule interactive? On
se croirait dans un jeu vidéo vintage aux graphismes similaires à Space
Invaders. Sur un échiquier électronique, les candidats triés au volet, écrasent
des araignées virtuelles pour sortir une clef rouillée. Moderne mais grotesque!
Je cuisine à ma manière Willy Rovelli qui distribue des makis aux yeux de
saumon ou des rollmops aux testicules de bouc sans oublier de nous gaver avec
ses mauvais jeux de mots. Rien de bien difficile: tu gobes, tu avales, tu
grimaces d’une manière écœurée et tu empoches une nouvelle clef. Enfin, la
lutte impossible avec Mister Boo suscite un intérêt en dessous de zéro. A part
John Cena ou Triple H*, qui peut humilier le colosse en le roulant dans une boue
épaisse? Attaché à la gériatrie audiovisuelle, je préfère le père Fouras
toujours loquace et tellement efficace. L’émission finira un jour ou l'autre
par s’essouffler contre vents et marées. Les vagues déferlantes qui s’abattent
sur ce vaisseau de pierre paraissent moins dangereuses que les scandales de bas
étage. Et malgré les querelles de
passerelle, au fort Boyard, ça ressemblerait presque à la vie de château.
Hervé Gaudin.
* John Cena et Triple H sont des stars de la WWE (catch américain).