La samba s’en va
Les prières n’ont pas suffi pour éviter
le pire. Et les larmes couleront longtemps sur les joues maquillées des
aficionados. Hier, le chagrin d’une nation entière transpirait aux quatre coins
de la planète football. La Seleçao tombe en ruines sous la fronde guerrière de
la Mannschaft. La presse internationale se lâche pour définir cette défaite dite historique: débâcle, naufrage, débandade, désastre,
écroulement, catastrophe, effondrement, désordre, chaos, déconfiture,
déliquescence, perdition, banqueroute, déroute, naufrage, désolation,
trahison. Tous les mots sont permis. Comme les coups du sort qui abîment
l’espoir. Une question s’impose: l’équipe
brésilienne est-elle finie? On pourrait en parler des heures autour d’une table
basse où s’éparpillent des restes de pizza de la veille, des bières éventées et
des bouteilles de soda gondolées. Bref, cela ne sert à rien d’analyser à la
lettre le jeu d’une équipe écrasée sous le joug implacable de la sélection
allemande. Fortement perturbée par l’absence de Neymar, le maître à jouer et la
suspension de Thiago Silva, critiqué fortement depuis le début de ce mondial,
l'équipe était déjà amorphe au coup d’envoi de cette demi-finale. Le kick off
s’est rapidement transformé en kick ass à la 30ème minute sous les
yeux humides des supporteurs ébahis, choqués, anéantis. Sous la houlette
de Joachim Löw, tacticien hors pair, les Müller, Khedira, Klose, Schürrle et
consorts ont joué le coup à fond sans mépris. Avec une décontraction déconcertante
et un réalisme à toute épreuve, ils ont relégué le pauvre Julio Cesar aux
rangs des gardiens les plus mauvais de ce tournoi. Quand tranquillité et
efficacité ne font qu’une, la Mannschaft mange du brésilien. Mon inquiétude se
porte sur un David Luiz, trop faible mentalement pour porter sur ses épaules
une défense bien trop fragile. Paris a misé gros sur lui au début du mercato
estival en finalisant un transfert proche de 50 millions d’euro (plus un bonus
de 10 millions). Cet achat compulsif devrait amener les dirigeants à une
vigilance accrue lors de ses prochaines prospections. Enfin, nous
nous accordons à penser que Neuer règne sur le trône des portiers surhumains.
De surprise en surprise, la compétition
nous emmène vers des épilogues improbables. On parie d’avance sur un succès
argentin mais n’oublions pas que bataves restent chanceux. Même si Cocu ne joue
plus, l’adjectif serait de bon aloi. La messe n’est pas dite avant que Messi et
les siens démontrent une vraie envie de figurer sur le "hall of fame"
des champions du monde. Belo Horizonte aurait pu devenir l’arène du bal
mais la samba s’en va pour laisser place à l’immobilité. Les rues sont
désertes, les maracas se taisent, les plages se couvrent de honte. Contre la
malédiction, on ne peut rien. Tous les bras tendus vers le ciel de Rio attendent le
miracle. Jonché au sommet du Corcovado, le Christ rédempteur n'en a pas la
moindre idée.
Hervé Gaudin
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